Retrouvez la lettre émouvante d’un supporter bastiais adressée à Yannick Cahuzac, qui aura marqué toute une génération de turchini en tant que capitaine du Sporting.

cahuzac

« Capitaine,

Je n’ai pas voulu t’écrire ces quelques mots le jour de ton départ, tout d’abord parce que c’était le même jour que l’annonce tragique que le Sporting ne sera pas repêché en ligue 2. Et puis également car je ne voulais écrire trop vite j’avais besoin de digérer un peu cette nouvelle. L’info c’est qu’après quelques 320 matchs en bleu tu quittes ce club qui t’a porté en lumière et surtout ce club si cher à ton cœur.

Je ne suis pas du genre à mettre en avant un joueur pour moi seul le Sporting compte,  les joueurs passent mais le club reste. Mais pour toi j’ai fait une exception.

Pourtant tout n’avait pas forcément bien débuté je t’appréciais parce que tu étais combatif que tu portais le nom d’un grand homme de ce club et que tu étais corse. Mais un soir, un triste soir d’hiver lors d’un match improbable de ligue 2 tu t’es fait « bouger » par Barbosa chez nous à Furiani devant la sud devant mes yeux. Cette nuit-là j’ai eu le sentiment que tu n’avais pas rempli ta mission et je t’assure que la déception était très forte. Je ne pouvais pas concevoir que l’on puisse baisser la tête lorsqu’un adversaire nous défie, surtout chez nous à Furiani. Ce soir-là je t’ai pris en grippe mais très vite tu as réussi à me faire oublier cela. Pourtant je suis plutôt têtu et de mauvaise foi mais je t’ai pardonné. J’ai compris que toi et moi nous nous étions simplement manqué ce soir-là.

Je ne vais pas revenir sur la descente aux enfers qui a suivi mais comme beaucoup il m’a fallu m’accrocher à un symbole pour croire au renouveau du Sporting et ce symbole ce fut toi : Notre Capitaine. Enfin un vrai capitaine du cru, pur produit du centre de formation c’est quand même autre chose que Pierre Yves André.

Et plus ça va et plus je me mets à t’aimer, à t’adorer parfois même à t’idolâtrer. J’ai l’impression que tu es parfois mon petit frère qu’il ne faut pas toucher, parfois mon grand frère qui cherche à nous protéger. Comme beaucoup je t’ai vu grandir et progresser, tu as été un symbole pour nous, celui de l’abnégation et du travail, celui de la rage, celui de l’humilité mais surtout celui de ce Furiani que l’on aime tant.  Avec toi rien ne nous paraissait impossible, le Sporting était en train de renaître et allait encore faire chier la France entière. Je n’oublierai aucun de ces moments que nous avons partagés, des moments de tristesse et de doute, aux moments de joies intenses et de fierté. J’ai eu l’impression de m’identifier à toi tout au long de ces années. J’étais stressé quand tu as pris la parole devant tout le stade contre Chateauroux, tes larmes contre Evian ont fait limite monter les miennes, ton coup d’épaule envoyant valser Valbuena dans les panneaux publicitaires m’a fait rêver et la fierté m’a envahi lorsque tu croises cette frappe dans le petit filet contre Rennes.

Mais le moment le plus intense que j’ai vécu avec toi restera ce moment sur la piste d’athlétisme du stade Louis II. Ce 4 février où nous sommes en finale et que je me retrouve dans tes bras au milieu de la foule, les larmes ont coulé comme celles d’un enfant de 4 ans. Je sais ça peut paraître ridicule pour certains, mais ce soir là entre une tension extrême, un temps de chien, un taux d’alcoolémie assez élevé (je l’avoue) et la fierté de retrouver le stade de France pour y foutre le bordel et redonner sa grandeur à notre peuple, j’ai craqué et je sais que je ne suis pas le seul.

Pour moi le Sporting ce n’est pas que du foot, c’est politique, c’est social, c’est sociétal, mais c’est avant tout une famille et hier j’ai perdu un frère. Un frère qui n’a même pas eu le droit aux adieux qu’il mérite dans sa cathédrale de Furiani. Un frère qui représentait l’amour du maillot et de son peuple, un frère qui a toujours salué ses supporters et qui les as traités avec respect. Un frère qui va beaucoup nous manquer !! Toi, l’Ajaccien devenu prince de Bastia ! Allora ti pregu a riescita per a seguita è una bona strada ! Cio chi ghjè sicuru, ghjè chi per mè serai sempri u mo Capitanu

A prestu Cahu »

 

Paul-Antoine S.